23 juillet 2011
Jazz à Toulon

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Var Matin, lundi 25 juillet 2011, par Jacqueline Cnobloch

La diva a surpris par son immense charisme,
samedi soir, malgré une panne de sono

Quel talent, quel altruisme, quel professionnalisme, ce bout de femme de 59 ans ! Liz McComb, en clôture du festival Jazz à Toulon, samedi soir au Mourillon, a été immensément ovationnée par 8000 personnes.

Tout a très mal commencé pourtant. La diva à la voix de contralto déchirée de contrastes se lance seule au piano... sans son. Pray for me (priez pour moi) chante-t-elle entre les grésillements des micros et les sifflements de la foule. Elle s'acharne : « Je viens de loin pour chanter ce soir, alléluia ! , adjure-t-elle en américain. La tension est à son comble. C'est un véritable supplice pour elle, pour les musiciens, les techniciens, le public. « Je vais tout faire pour vous rendre heureux », clame-t-elle à tous. Paraît qu'avant le spectacle, elle n'a pas seulement prié pour se concentrer, elle a plongé en elle, presque en transe, pour mieux s'offrir émotionnelle-ment et spirituellement.

Au milieu de la foule

Après quelques minutes de noir total pour relancer la sono piégée par une baisse de tension électrique, la revoici... au milieu de la foule! Elle la traverse de part en part pour lui redonner son entrain et enjoint un formidable Jéricho. Le public, stupéfait, l'acclame, debout sur les chaises et l'accompagne d'une pluie de flashs.

Celle qui représente la quintessence de la musique afro-américaine peut alors imposer par son talent. Émouvante, puissante, généreuse elle s'offre sans sourire, comme par devoir de donner. Impressionnante, elle improvise, livre entre autres, une époustouflante version When the saints go marching in et se fend d'un duo vocal avec son organiste Harold Johnson. Et une fois les lumières tombées, elle serre longuement dans ses bras le technicien....

Jacqueline Cnobloch

 

... une des grandes voix du XXIe siècle.

Jazz Hott, n° 657, automen 2011, par Félix W. Sportis
(voir au format PDF)


Liz McComb et Harold Johnson

Le 23, Plages du Mourillon : Le grand concert attendu avec gourmandise, celui de Liz McComb (p, voc) avec son extraordinaire groupe composé de Harold Johnson (org), Yvon Rosillette (g), Hilaire Penda (b), Philippe Ma-kaia (perc/gwokas) et Larry Crockett (dm). On ne fut pas déçu, c'est ce qu'on a entendu de plus fort ( festival, et c'est l'un des plus fabult concerts que j'ai entendu depuis longV temps. Pourtant on a frisé la catastrophe dès le début. Un problème d'électricité et c'est toutes les lumières qui s'éteignent. La chose réparée c'est la partie son, pour la même cause, qui s'est retrouvée muette dès le premier morceau. On fit signe à Liz d'arrêter mais elle refusa et déclara : «Je suis de la vieille école, ces gens sont venus pour m'écouter, je continue à jouer.

Le son finira bien par revenir. » Finalement elle dut se rendre à l'évidence et quitta la scène avec ses musiciens. Dès la panne réparée, elle partit chanter dans la foule jusqu'au fond de l'enceinte pour que ceux qui ne l'avaient pas entendue puisse la voir et chanter avec elle, puis elle revint sur la scène, sur laquelle elle resta deux heures et demie en se donnant corps et âme, avec une passion, une générosité, une ferveur rares. Foule en extase. Le gui-, tariste Yvon Rosillette nous offrit des plos à faire éclater les neurones, Ha-IJohnson joue de l'orgue et chante en écho et en partage avec Liz, et Dieu nous attend au Paradis. La rythmique est du feu de dieu, et le joueur de gwoka est une rythmique à lui tout seul en solo, et cela avec un seul tambour et ses deux mains. J'ai souvent vu et entendu Liz McComb, je ne l'ai jamais trouvée aussi fervente, quasiment en transe, d'une puissance, d'un ; feeling et d'un swing aussi captivants.

Et quelle image quand elle se dresse ! habillée de ce pantalon noir à plis, une véritable sculpture gospel ! Après le concert, les gens disaient en avoir eu la chair de poule de bonheur, et certains assuraient qu'ils se trouvaient autres, habités par cette musique. Un très grand moment offert par celle qui, je pense, est une des grandes voix du XXIe siècle, et certainement la référence du gospel-blues-jazz, tant elle abolit les frontières entre les genres pour créer cette musique qui vient droit des origines à La nouvelle-Orléans, et parle au corps, au cœur et à la tête.

Félix W. Sportis

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